24/10/2013
Olivier Sprigel -Venusine
Olivier Sprigel est l'un des trois pseudonymes de Claude Avice, plus connu comme Pierre Barbet. De fait, ce court roman, publié au Masque SF, reprend un héros que l'auteur a largement exploité au Fleuve Noir sous le nom de Barbet: Setni. Setni est un astrot, capitaine et aventurier, agent de Pollux 3 chargé de résoudre les diverses énigmes de l'univers.
Dans Venusine, il débarque sur un monde qui vient tout récemment de subir plusieurs montées des eaux successives, ce qui entraîne de multiples conflits entre les trois races locales, les Ondins, maîtres des océans, les Arnits, hommes-oiseaux, et les simples humains qui vivent sur la terre ferme. Qui est donc derrière ces déluges? Qui donc a distribué à certains des artéfacts technologiques totalement déplacés sur ce monde dont le stade civilisationnel ne dépasse pas le Moyen Âge?
De Pierre Barbet, je n'ai lu à vrai dire que son cycle des Cités de l'espace, une série narrant la conquête difficile de l'espace par l'Humanité, pleine d'idée, mais au style souvent peu enthousiasmant et aux personnages à la psychologie plus que sommaire. Avec Venusine, Barbet/Sprigel fait encore moins bien. L'intrigue est celle d'un mauvais roman de fantasy, sauf qu'il y ajoute un super-héros, un astronaute pour qui il n'est absolument pas difficile d'être un dieu. A tout problème il a une solution technologique miracle, un gadget à portée de main, dont il n'a aucun scrupule à se servir. Ainsi les situations souvent grotesques s'enchaînent, d'ailleurs de plus en plus rapidement: on sent l'auteur l'auteur pressé de finir, d'autant plus que le Masque SF était comme le Fleuve Noir Anticipation une collection aux volumes formatés. Du coup, la lecture donne l'impression d'un hop hop hop rapide mais sans passion. A oublier.
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12/03/2013
Olivier Deparis - Main mise sur Jakobar
En ce moment, je lis la thèse de Gaël Hily sur le dieu celtique Lugus, le premier tome de l'intégrale d'Omale par Laurent Genefort, We Modern People, remarquable thèse sur la proto-SF russe d'Anindita Banerjee. Du sérieux, du gros, du très bien certes, mais parfois il faut que mon cerveau se repose. Alors pour ça il y a mes relectures des Le May, le visionnage de Star Trek Voyager, et quelques petits romans plus ou moins récents. Main mise sur Jakobar (Rivière Blanche, 2011) d'Olivier Deparis est de ceux-là.
Le titre annonce clairement la couleur (y compris par son jeu de mot): Main mise sur Jakobar nous promets une forme de western dans l'espace. Tom est un soldat, un pilote plus précisément, chargé d'entrer en contact avec la Main, un groupe de cinq experts qui travaille secrètement pour le gouvernement fédéral. Mais rien ne se passe comme il le faudrait: à peine leur vaisseau a-t-il quitté la station de Tertius que celle-ci est détruite par l'armée, ainsi que le vaisseau qu'ils étaient censés rejoindre. Avec au final des milliers de morts et une accusation de terrorisme portée contre la Main, qui est ainsi obligée de trouver refuge sur Jakobar, un monde jusque-là resté indépendant.
De l'action, de l'action, de l'action. Avec ce court roman, nous sommes servis. Olivier Deparis en perd pas son temps en considérations métaphysiques ni en affinage de psychologie: l'action virevolte, sans la moindre trève, dans un scénario bien huilé et porté par une plume efficace. A ce titre-là, Main mise sur Jakobar n'usurpe pas sa place chez Rivière Blanche: il s'agit bien d'un très honnête FNA à la lecture agréable. L'objectif, détendre, est atteint.
Mais pour un premier roman, il n'est évidemment pas sans défauts. Un tic de langage d'abord: des acronymes systématiquement développés de façon maladroite, par exemple: "FH (la Fédération Humanoïde)", quand il suffit d'écrire une première fois "Fédération Humanoïde", puis d'employer FH par la suite. Ce qui me mène au deuxième défaut: pour une fois, quelques petites pages - pas bien nombreuses mais quand même - de contextualisation auraient été nécessaire. On ne voit jamais les ennemis autrement que comme des points sur l'écran radar, et du coup on ne sait guère qui ils sont.
Ce qui n'empêche pas cela-dit de suivre toutes ces péripéties avec plaisir. Avant de repartir sur du plus lourd.
12:09 Publié dans Livre, Planète-SF | Lien permanent | Commentaires (0)
09/03/2013
Jean et Doris Le May - La Mission d'Eno Granger
Il est des romans des Le May qui sont maladroits, ça n'est pas une nouveauté pour ceux qui suivent ce blog. Parmi ceux-ci, les romans qui, avant de plonger le lecteur au coeur de l'histoire, passent par une longue séquence d'introduction qui tient parfois du remplissage. Ainsi en est-il de La Mission d'Eno Granger (1970). Les Le May ont voulu écrire une histoire de naufragé, un thème récurrent chez eux. Mais avant de nous plonger dans le vif du sujet, ils nous exposent longuement, trop longuement, les origines du naufrage. Des astronomes ont détecté au sein d'un groupe d'étoiles des mondes riches en éléments utiles à la navigation interstellaire. Une première mission est envoyée, mais on perd bientôt toute trace de celle-ci. Interco dépêche alors sur place un de ses chasseurs, avec à son bord deux de ses meilleurs éléments, accompagnés comme il se doit de leurs bis féminins. Mais le chasseur, en approche d'un des mondes, est touché par un projectile. Ce qui n'aurait du prendre à la limite que cinq ou six pages, en prend ici plusieurs dizaines, les Le May délayent, mettent en place inutilement des personnages qu'on ne reverra plus par la suite.
Mais enfin, on arrive au roman en tant que tel. Un homme seul, gravement blessé, possédant - heureusement encore - sa combinaison de sauvetage. Touché à la tête, il ne se souvient plus que d'une chose: il a une mission à accomplir. Mais laquelle? Et est-il seul sur ce monde hostile? Eno Granger, un nom qu'il ne se remémorera que tardivement, va errer à la recherche de sa mémoire, et donc de ses coéquipier, cherchant à tout prix à comprendre ce qui lui arrive.
Si l'on fait abstraction de sa calamiteuse introduction, La Mission d'Eno Granger est un formidable roman. D'abord de par son contexte: un homme seul, amnésique, échoué sur un monde appartenant à un systéme binaire, l'une de ses faces exposée à une étoile, et l'autre à l'autre astre, chaque étant porteuse d'une civilisation différente, que tout oppose. Et là dedans, Eno Granger va être comme un grain de sable, un élément pourchassé car forcément hostile à des êtres que paradoxalement il ne verra quasiment pas.
Formidable, ce roman l'est aussi par son style, épique, tenant presque de la poésie en prose. Une façon de faire inhabituelle dans la collection Anticipation du Fleuve Noir, et même dans toute la SF de l'époque. Le phrasé des Le May porte le lecteur d'une page à l'autre, dans une sorte d'ivresse qui permet l'identification à ce héros sans mémoire.
La Mission d'Eno Granger est à la fois subtil et beau, mais voilà, en raison de son défaut de construction, il restera un roman mineur.
15:19 Publié dans Jean et Doris Le May, Livre, Planète-SF | Lien permanent | Commentaires (0)