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13/01/2013

Jean et Doris Le May - Il était une voile parmi les étoiles

VOile.jpgJe vais me faire mentir par rapport à ce que j'écrivais hier (dernier Le May avant la fin de mon congé), mais bon, autant que je profite de ce dernier jour pour rappatrier une note rapide que j'avais écrite sur le forum d'ActuSF il y a plus de quatre ans, concernant le roman Il était une voile parmi les étoiles (1976).

Un roman décevant, il faut le dire, un de ceux visiblement fabriqué à partir de deux sujets travaillés séparément, puis unis vaille que vaille pour faire un volume.

Qu'on se le dise! Pour avoir un bon astronef, choisissez un astronef FRANCAIS! Oui, madame!
Le début de ce roman est franchement ridicule, pseudo intrigue d'espionnage, où un savant au nom improbable (Danne Bedanne), vend volontairement une de ses inventions à une multinationale pour pouvoir financer une invention autrement plus importante: un astronef qui serait d'une simplicité étonnante. Le ton très gaulliste de cette partie est limite pathétique, avec ce bon gouvernement français qui doit faire face à toute la puissance des Multinas et de leur dieu Dollar. Mais cela change heureusement assez vite lorsque l'action se déplace dans l'espace, qui semble tout de même bien être le milieu de prédilection de nos deux auteurs. Une course parmi les planètes du système solaire, mettant aux prises humains et ET, est l'occasion d'une vaste entreprise de propagande en vue de faciliter les contacts entre les humains et lesdits ET. On a là au passage un bien belle réflexion sur le rôle de la propagande. Y a-t-il une bonne propagande, a-t-on le droit d'en faire, même pour une noble cause? C'est plutôt intéressant et réussi. Dommage que le style ne suive pas toujours. J'ai parfois souvent eu l'impression de lire un roman de Kazantsev, d'autant plus qu'au fil de l'histoire, il se créé une improbable Nouvelle Union Socialiste d'Eurasie.
A la lecture de ce roman, on peut d'ailleurs à une question que certains se posaient concernant l'orientation politique des auteurs: ils étaient probablement gaullistes de Gauche.

12/01/2013

Jean et Doris Le May - L'hypothèse tétracérat

Tétracérat.jpgAllez, un dernier Le May pour la route, avant la fin de mes trop courts - hélas - congés. J'ai voulu cette fois-ci faire un bon dans le temps, histoire de voir comment avec les années le style de ces auteurs a pu évoluer. Avec L'hypothèse tétracérat (1978), nous sommes toujours dans le cadre de la Fédération galactique, même si ici Interco n'apparaît pas. L'Elenobora est un vaisseau transgalactique, un transporteur de passagers d'un monde à l'autre. Mais voilà qu'une nova lui fait subir une avarie de moteurs et même le transporte fort loin de sa trajectoire prévue. Incapable de se déplacer plus vite que la lumière, il est contraint d'aborder un monde placé en réserve du fait de la présence d'une forme de vie possiblement en voie de bâtir une civilisation.

Ainsi les quelques centaines de passagers survivants se retrouvent-ils à la surface d'un monde particulièrement hostile, et l'équipage doit même se préparer à la possible sédition d'un groupe de perturbateurs, dont un homme qui semble être un tueur né, Ek Danil. Aussi une jeune femme, membre de l'équipage, décide-t-elle de former une mission d'exploration composée quasi-uniquement de ces hommes potentiellement violent.

Le début de ce roman ne brille guère par son originalité. Le naufrage vient - dans les moindes détails - d'Arel d'Adamante. La révolte possible des passagers est quant à elle pompée dans Les Fruits du Metaxylia. Mais c'est ainsi que les Le May procèdent, après tout: par collages de pièces mobiles. Parfois ça casse, souvent aussi ça passe, comme ici où la soudure entre ces parties se fait sans trop de problèmes pour aboutir à un bon récit d'aventures dans une jungle inhospitalière. C'est loin, cela-dit, d'atteindre le niveau des Landes d'Achernar, pour rester dans le même thème.

Stylistiquement, les Le May n'ont guère changé, même si l'on peut constater une plus grande propention à employer des injures qu'on ne trouvait auparavant pas, du moins dans les romans de leurs premières années de carrière.

Ces injures sont mêmes accompagnées de quelques propos à la limite de la misogynie, assez déplaisants, puisque les femmes y sont parfois décrites comme des femelles soumises à leurs sécretions hormales. Bref, les femmes sont des chieuses encore plus pénibles et inutiles lorsqu'elles ont leurs règles. Sauf que les auteurs apporte vite la preuve qu'il ne s'agit-là que de la pensée de leurs personnages, en montrant une jeune femme toute menue être finalement assez coriace pour survivre à la jungle, mais aussi pour tenir tête tant au commandant du vaisseau, son supérieur, qu'à Ek Danil, deux hommes qu'elle va dompter.

Bref, tout ça pour dire que ce roman, s'il ne casse pas des briques, n'en constitue pas moins une agréable lecture de détente.

11/01/2013

Isaac Asimov - Fondation

 

Fondation.jpgJ'ai du lire le cycle de base de Fondation, d'Isaac Asimov, au moins quatre fois. Mais ce fut il y a longtemps. A treize ans, quinze ans, dix-huit et vingt-trois. C'est dire si je l'ai aimé : je me souviens parfaitement de ces lectures. Et puis il y a eu le dossier de Bifrost n°66, consacré à cet auteur, et auquel j'ai très modestement contribué, dossier dans lequel plusieurs critiques – dont moi – ont eu à revenir sur ce qui constituait pour eux une excellente lecture de jeunesse. Or la lecture plus « adulte » a visiblement été souvent décevante. Alors je me suis décidé à me prêter à nouveau à ce jeu, mais avec une œuvre autrement plus importante que Les Dieux eux-mêmes, que j'ai eu à aborder pour Bifrost. Autrement dit, retour à Fondation. Mais pas l'ensemble du cycle, non, juste ce qui, dans mon souvenir, était ce qu'il y avait de mieux, la trilogie initiale. J'ai donc revendu mes anciennes éditions, et me suis procuré la réédition de 2006 chez Lunes d'Encre. Il faut dire qu'une note de Gilles Dumay concernant cette réédition ne pouvait que m'obliger à franchir le pas : « il manquait 36 feuillets à Fondation, 57 feuillets à Fondation et Empire, 30 feuillets à Seconde Fondation » !

 

Et puis ce fort gros volume a tout de même plus de gueule que les vieux Présence du Futur violets que j'avais.

 

Je ne vous ferai pas l'injure de vous présenter le contenu de la chose : Fondation est un classique, lu par tous ou presque, aussi passerais-je directement à la partie « critique » (si l'on veut, je n'ai pas l'intention non plus de faire un article).

 

On l'a souvent écrit, et il est possible même qu'Asimov en ait fait état, que son modèle pour Fondation, ou du moins pour décrire l'évolution d'un empire, était The History of the Decline and Fall of the Roman Empire d'Edward Gibbon, un immense classique de l'historiographie anglo-saxonne. Il serait bien évidemment vain de dire le contraire. Cette lecture est même particulièrement sensible dans l'histoire du général Bel Riose et de l'empereur Cléon II, qui mêle habilement deux séquences historiques concernant la chute de l'Empire romain, tout deux basées sur la rivalité entre un général tout puissant et un empereur jaloux : pour l'Occident, Aetius et Valentien III, pour l'Orient Bélisaire et Justinien. Ce passage est d'ailleurs un des morceaux de bravoure de Fondation, un de ceux que j'ai eu le plus plaisir à relire.

 

Oeuvre basée sur l'Histoire, Fondation est aussi, en quelque sorte, la réflexion de son auteur sur les théories de l'Histoire alors en vogue, et notamment sur le matérialisme historique de Marx. Hari Seldon, quelque part, c'est Marx. A savoir quelqu'un qui analyse l'Histoire avant de proposer une solution pour en modifier le cours. Voilà quelque chose dont on – en tout cas moi – n'a pas nécessairement conscience lorsqu'on est jeune et qu'on n'a pas le bagage nécessaire pour comprendre. En cela, pour son époque, Fondation est une œuvre brillante.

 

En revanche, on pourra lui reprocher sans conteste sa faiblesse, ou plutôt son inégalité stylistique. Certes l'écriture de l'ensemble a pris plus de huit ans, et il est normal que dans un tel laps de temps, le style d'un auteur évolue. Fondation – je parle toujours de la trilogie – est ainsi parfois un texte vif, enlevé, haut en couleur, du pur space opera, en quelque sorte, mais parfois aussi quelque chose de bien plus mou voire totalement raté, notamment dans Seconde Fondation où les choix de construction narrative tranchent parfois trop avec le reste pour convaincre – ainsi les interpolations de réunions au sein de la Seconde Fondation, avec orateurs anonymes, sont-elles totalement inutiles.

 

Quoi qu'il en soit, nous ne sommes pas, sur ce point, en présence d'une grande littérature. Fondation est désespérément / magnifiquement (choisissez selon la direction dans lequel votre cœur balance) pulp. C'est une lecture pour tous, et assurément une lecture « jeunesse ».

 

Autrement dit, si vous avez un ado à la maison, collez-lui donc ce bon gros livre sous le sapin de Noël, vous ferez ainsi une très bonne action. Après cette relecture, Fondation, malgré toutes ses imperfections, demeure à mes yeux un classique indémodable, et il ne fait guère de doute que je le relirai, sans doute pas dans un futur proche, mais au moins avant ma retraite !