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08/05/2012

Tom Piccirilli - La Rédemption du marchand de sable

Piccirilli.jpgVoilà un moment qu'il attendait sur la table de nuit, celui-là. Il faut dire que j'étais tout à la fois tenté et repoussé par la thématique de ce livre. Imaginez: un tueur en série a en quelques temps assassiné de nombreux enfants, avant de se mettre à donner aux parents des victimes des bébés enlevés à des familles indignes. Eddie Whitt est le père de la première des victimes. Sa fille est morte, sa femme est devenue folle, et depuis des années il est financé par son beau-père pour traquer le criminel, lequel lui envoie régulièrement des lettres en apparence fantaisistes, peuplées de personnages imaginaires.

Un thème pour le moins peu banal, une couverture qui personnellement m'a frappé, et donc attiré. Bref, l'achat de La Rédemption du marchand de sable de Tom Piccirilli me semblait indispensable.

Et je n'étais pas loin d'être dans le vrai. Dès le début, nous plongeons dans un univers mentalement instable, Whitt étant contraint de se rendre auprès d'une secte rassemblée autour d'une mère totalement folle et de ses deux fils, un décérébré et un aveugle à la force titanesque. C'est glauque de chez glauque, mais ça tape juste. Toute l'ambiguïté des relations entre Whitt, justicier auto-proclamé, et la police, qui le condamne mais en même temps espère se servir de lui, est remarquablement présentée. On regrettera tout au plus que les décors ne soient pas plus que ça mis en place. On sait rarement où l'on est.

Au final on s'attend tout de même à prendre un upercut au ventre... et puis finalement non. Avec l'introduction d'un nouveau personnage, un agent du FBI, Piccirilli fait graduellement dériver son roman vers quelque chose qui tient du thriller on ne peut plus classique. Il ne s'agit pour autant pas d'un effet de pétard mouillé, mais plutôt d'un affadissement progressif avant une fin attendue. Dommage.

Reste que La Rédemption du marchand n'est pas un mauvais roman, loin de là: il procure efficacement son lot de sensations fortes, mais il ne semble pas aller jusqu'au bout de son potentiel.

Jean et Doris Le May - Les Trophées de la cité morte

Trophées.jpgUn lointain futur. Une catastrophe, sans doute due à l'Homme, a eu lieu et a ravagée la Terre. L'Humanité ne survit plus que sous forme de petits clans soumis à une organisation strictement matriarcale. L'homme ayant par le passé détruit la civilisation, c'est donc maintenant la femme qui a le pouvoir. Un pouvoir strict et sévère: l'homme n'est plus qu'un outil, le serviteur de la femme. Mais Ion et celle qu'il aime, Sri Ea, n'entendent pas laisser les choses ainsi. Ils veulent rester ensemble tandis que Mara Han Sul, la maîtresse du clan, voudrait les séparer, et envoyer Ion dans un autre clan. Ion se rebelle et lance un défi.

Il doit alors se lancer dans une course, contre un chasseur de l'autre clan, en direction de la Cité morte, et en ramener quelque chose que tout le monde pense inaccessible: un trophée prélevé sur une chimère, un de ces monstres qui hantent les ruines antiques. Mais Ion n'écoute que son courage et se lance dans l'aventure.

Avec Les Trophées de la cité morte, les Le May publient en 1971 un roman qui de nos jours serait sans doute publié en collection pour la jeunesse. L'intrigue est simple, le cadre classique. Et pourtant c'est une belle réussite. Ce roman ne souffre d'aucun temps mort, et surtout son contexte, qui semble simpliste, ne l'est pas tant que ça. Bien sûr on a là le récit de la rébellion d'un jeune homme face à une société qui l'étouffe. Mais il ne souhaite pour autant pas détruire cette société: juste en fonder une autre, ailleurs. A chacun sa vie. De même, l'idée d'une société strictement matriarcale imposant une quasi servitude aux hommes aurait pu être à l'origine de propos plus ou moins misogynes: il n'en est rien. Ion et Sri Ea veulent être égaux. Bien sûr Ion est plus fort physiquement et sera dévoué aux tâches difficiles, mais chacun, pourtant, aura son rôle à jouer dans la lutte contre les chimères, ces reliques des temps passés.

Clairement, les Le May se hissent ici au niveau des meilleurs romans de Stefan Wul. On pense à Niourk, notamment, qui fut lui-même régulièrement réédité dans des collections pour la jeunesse. Les Trophées de la cité morte mériteraient d'être redécouverts.

Jean Millemann - Sanshôdô. La Voie des trois vérités

Sanshodo.jpgVoilà qu'un jour les ET arrivent. De gros vaisseaux qui planent dans les airs au-dessus des villes. Voilà un début on ne peut plus classique. Sauf que cette fois, ils ne sont pas là pour envahir, mais pour partager. Venus en paix, ils s'inquiètent toutefois du fait que l'Humanité ne soit pas assez mûre pour ce contact, et donc limitent volontairement, dans un premier temps, les échanges. Mieux, ils créent une station qui devra servire en quelque sorte de plateforme diplomatique. La Terre y envoie en guise de représentant un docteur en biologie, charger de collecter en douce toutes les informations qu'il pourra recueillir, tandis que les ET lui donnent comme associée une Nagaï, une créature dont le physique et le mental sont ce qui se rapproche le plus des canons humains.
Très vite le Terrien subit un premier choc: les ET sont prêts à donner ce que lui vient dérober. Destabilisé, il tente de passer outre ses a priori et de mieux connaître sa partenaire.

Voilà grosso modo l'intrigue de la première - et la plus longue - des trois nouvelles qui composent Sanshôdo, un petit recueil de Jean Millemann publié chez Ad Astra, des textes tous situés dans le même univers, avec pour arrière plan cette visite pacifique des ET. D'emblée on peut constater que s'il part d'une idée particulièrement banale, Jean Millemann, à la manière de Yoss et de sa Planète à louer! sortie quasiment en même temps, la renouvelle de façon singulière. Pas de guerre sans fin, pas de combat ni de mise directe en esclavage. Mieux: des dons, gratuits. Des bienfaits venus du ciel. Et ce qui ne gâche rien, Jean Millemann est doté d'une plume sensible, qui laisse passer les émotions de façon forte. Pourtant... pourtant ça n'a pas vraiment pris sur moi. J'ai clairement eu le sentiment que les choses allaient trop vite: le personnage principal, qui n'est pas nommé, s'abandonne dès le départ, s'effondre presque, sans que rien ne le laisse sentir. On pourrait arguer qu'il s'agit d'un choc émotionnel, que cela était prévisible vu le passé de l'homme, mais on ne le sens pas assez venir, de même que toute la suite. L'auteur, à mon avis, aurait du prendre son temps, développer plus le contexte pour donner plus de force à l'évolution du mental de son héros. De fait, on ne voit quasiment pas la station, par exemple. Très vite, trop vite, tout n'est plus axé que sur le héros et sa compagne nagaï.

Il reste que Sanshôdô est un malgré tout un bon livre, qui mérite le détour et qui donne envie d'aller découvrir le reste de l'oeuvre de Jean Millemann. Mais peut-être en attendais-je un peu trop.