31/03/2012
Jean et Doris Le May - Les Cristaux de Sigel Alpha
Continuons notre exploration de l'univers des Le May avec Les Cristaux de Sigel Alpha (1971), un roman qui prend place dans le cycle des enquêtes galactiques. Somelekan Greer est un prospecteur: doué d'un talent rare, il n'a pas son pareil pour détecté dans toute roche ou tout terrain les cristaux les plus précieux. A ce titre, il est admis à prospecter sur la très fermée Sigel Alpha, une planète dont la géologie particulière a justement pu engendrer des cristaux de tous type d'une valeur immense. Contrôlée par la Ligue des Gemmologues, Sigel Alpha est en fait une prison pour prospecteurs malchanceux: la Ligue en effet se réserve l'intégralité du commerce des pierres, et rachète celles-ci aux prospecteurs à un prix dérisoire, les empêchant ainsi de repartir. Pourtant, des traffics existent, et la famille d'Arne Viggen, le commandant d'un petit vaisseau de commerce semi-clandestin, semble bien y être mêlée.
Somelekan Greer, avec l'aide de deux Adamalones - sorte de fourmis géantes intelligentes mais que tout le monde prend pour des animaux - va tenter d'échapper à ce piège, secondé Sheen Viggen, la fille Arne, coincée avec lui lors d'une tempête mortelle dans l'abri du prospecteur.
Les Cristaux de Sigel Alpha est un roman qui n'a pas les qualités poétiques et philosophiques des Landes d'Achernar, autant le dire d'emblée, mais il offre malgré tout un excellent petit space opera, un western sidéral bien troussé, à l'intrigue basique, mais intelligente. Et pour pimenter cela, les Le May y ont ajouté une confrontation qui leur est chère: celle du baroudeur et de la jeune femme intrépide. Sheen et Somelekan passent leur temps à s'envoyer des piques, et, alors que parfois les auteurs échouent à faire de ce type de passage quelque chose de digeste (cf. Vacances Stellaires dont je parlerai plus tard), ici il n'en est rien. Bref, on tient entre les mains de quoi donner au lecteur quelques bonnes heures de détente: de l'action, de l'amour, un scénario pas trop linéaire et réservant quelques surprises. Un bon cru du Fleuve Noir Anticipation!
21:45 Publié dans Jean et Doris Le May, Livre, Planète-SF | Lien permanent | Commentaires (2)
27/02/2012
Jack Moik - Star Cruiser
A l'origine de cette note se trouve une envie de détente, de plaisir cinématographique facile, de film pas trop bête quand même, mais qui délasse. Un bon navet rigolo l'aurait bien fait, par exemple, mais aussi un blockbuster qui ne prenne pas trop ses spectateurs pour des courges. A défaut de blockbuster, j'ai jeté mon dévolu sur Nydenion, alias Star Cruiser, rendu curieux par l'argumentaire associé au film: cette production allemande est l'aboutissement de plusieurs années de travail d'un maquettiste, spécialiste en trucages cinématographiques, Jack Moik, lequel a porté pendant près de 15 ans son projet de space opera avant enfin de pouvoir le boucler avec des moyens professionnels. Alors pourquoi pas, jetons-y un oeil.
Jack Moik est donc le producteur originel, réalisateur, scénariste, directeur de la photographie, du montage, de la bande-son, compositeur de la musique et acteur principal. Rien que ça. On peut alors commencer à se demander si l'on n'a pas affaire à un projet de mégalomaniaque.
Qu'en est-il exactement? 2630. L'empire Sykon et la confédération se livrent une guerre sans merci depuis 57 longues années. Le monde est vidé de ses ressources, les troupes sont épuisées, et la rumeur d'un soulèvement populaire se propage comme un virus. Seule issue possible : la Paix. Désormais en marge de l'Armée, l'ex-capitaine Rick Walker est devenu le mercenaire le plus doué de l'Empire. Engagé pour une simple mission de transport, il est loin d'imaginer que le sort de l'univers se trouve à bord de son vaisseau. Au milieu du chaos laissé par des années de guerre, il est notre seul espoir.
Ca, c'est le pitch officiel. Ca fait un peu peur, tout de même. Pompage impressionnant du pitch de base - déjà fort maigre - du jeu Total Annihilation. Et donc ce fameux Rick Walker, sort de Han Solo du pauvre, s'en va convoyer une diplomate vers un vaisseau aux coordonnées tenues secrètes, à bord duquel ont lieu des négociations de paix. Elle doit s'y rendre car une bombe y a été pausée par des méchants bellicistes qui évidemment vont tout faire pour saboter la mission de Walker.
Bon. Déjà, une évidence apparaît: Moik n'est pas scénariste. Il n'y a strictement rien de neuf dans tout cela. L'histoire de Star Cruiser est une mise bout à bout de divers pompages: Star Wars, Titans AE, Battlestar Galactica (l'original), un brin de Star Trek. Des plans entiers, des éléments de design sont repris d'un peu partout. Les répliques sont du même calibres: jamais le spectateur n'est surpris. Il faut dire que tout cela devait être mis au niveau des acteurs, afin de leur éviter de trop montrer leur absence complète de talent. Moik a en effet recruté des parfaits amateurs - passionnés eux-aussi, n'en doutons pas, mais dont la bonne volonté n'arrive pas à effacer leur totale nullité. Moik lui-même, non plus n'est pas acteur: il est totalement mono-facial.
Jack Moik est: content, angoissé, craintif, exhalté, en colère, tout ce que vous voulez, au choix.
Reste la mise en scène. Oui, je passe directement à la mise en scène sans trop m'arrêter sur l'image et les trucages. L'image est hideuse, tout bonnement. Quand aux trucages, ils vont du moyen au lamentable.
Oh, la jolie incrustation de la mort qui tue! Et la pixellisation n'est pas due à la capture d'écran.
On peut donc difficilement dire que Jack Moik ait été directeur de la photographie...
La mise en scène donc. Bof, c'est tout ce que l'on peut en dire. Les scènes spatiales ne sont pas trop mal, mais dès que Moik a la mauvaise idée de faire des gros plans faciaux sur ses acteurs... voir ci-dessus pour les acteurs: on comprend vite qu'au lieu d'intensité dramatique, il développe chez le spectateur d'abord une irrépressible envie de sourire (mais pas de rire: il ne faut rien exagérer), puis une poussée de mauvaise humeur. La volonté de s'arrêter et de déclamer haut et fort "Mais qu'est-ce que c'est que cette merde" revient souvent.
Vous l'aurez compris: Space Cruiser est de ces films de passionnés qui peuvent obtenir bien des louanges au festival du film amateur de Trifouillis-les-Perpettes, mais qui par contre n'auraient JAMAIS du être commercialisés.
Par chance, je me suis contenté de l'édition en DVD, que j'ai d'ailleurs déjà réussie à revendre, mais je plains tout ceux qui ferons l'acquisition de la version Blueray: un Blueray pour un truc à l'image digne d'une VHS démagnétisée, c'est presque de l'escroquerie.
13:35 Publié dans Film, Planète-SF | Lien permanent | Commentaires (3)
23/02/2012
Frank M. Robinson - Le Pouvoir
Bill Tanner, professeur d'anthropologie aux Etats Unis, travaille au sein d'un Comité dont le but est de déterminer pourquoi certains survivent mieux et plus longtemps à une situation de conflit. Un questionnaire est mis au point et testé anonymement sur les membres du Comité eux-mêmes. Or il se trouve qu'un des questionnaires rendus est clairement hors-normes. Alerté par un certain Olson, clairement inquiet, tous se réunissent autour d'une table et tentent un test de télékinésie. Et l'un d'entre eux, sans se dévoiler, fait tourner le petit « parasol » en papier objet du test. Il y a donc un mutant, un surhomme, au sein du Comité.
A partir de là, tout le monde commence à prendre peur. Tanner essaie de découvrir le surhomme en question, avant de découvrir Olson mort sans cause apparente. Et petit à petit, son univers s'effondre : ses dossiers universitaires disparaissent (il est alors viré), ses dossiers bancaires aussi (il se retrouve sans fonds), etc. Tanner semble être l'objet d'une traque, mais décide finalement de traquer le traqueur, pourtant supposé largement supérieur à lui-même.
Roman écrit dans les années 50, révisé dans les années 90, Le Pouvoir de Frank M. Robinson (Folio SF, 2004) pose problème. Alors que l'on pourrait être tenté de le voir comme une parabole du Maccarthysme, on voit assez rapidement que quelque chose cloche : le traqué est maléfique. Jamais cette place n'est remise en cause. Il est un ennemi de la société et la traque est donc justifiée. Si Tanner essaie de l'étudier, ça n'est pas réellement pour le comprendre, mais pour l'abattre. De ce point de vue, Le Pouvoir s'avère très binaire, très manichéen.
De plus, ce texte est censé avoir été révisé en 1999. Cela transparaît dans quelques allusions à des événements historiques (la guerre du Vietnam), tout en ne changeant rien au style, très années 50. Cependant, est-ce de cette révision que vient parfois la sensation de coupes, d'éléments manquants ? Par deux fois j'avoue m'être demandé d'où sortait un personnage.
Pour autant, Le Pouvoir n'est pas un mauvais roman, loin de là. On se laisse happer assez rapidement par l'écriture de Robinson, qui a produit-là un bien agréable thriller, classique, mais efficace. Idéal pour quelques heures de détente.
11:21 Publié dans Livre, Planète-SF | Lien permanent | Commentaires (0)