20/07/2018
Christian Léourier - Ti-Harnog
L'humanité a essaimé dans une partie de la galaxie. Mais depuis les liens entre les mondes se sont rompus, et seule Lanmeur, une planète civilisée, envoie un peu partout des contacteurs chargés d'explorer les autres mondes et de voir si des relations sont possibles. Twern est l'un d'eux. Mais son arrivée sur Ti-Harnog se passe fort mal: son vaisseau est détruit et il n'a pas eu le temps d'apprendre ce qu'était le monde sur lequel il a atterri. Ti-Harnog est particulière: l'humanité, dont la civilisation en est au stade médiéval, est organisée grâce à une système de castes strict, mais volontaire. On ne naît pas dans une caste, on fait le choix de lui appartenir. Ce choix se fait à un moment particulier de la vie. En effet, sur ce monde, on naît femme, et on meurt homme. Et c'est lorsque la transformation physiologique se fait que la caste est choisie. Les conflits sont rares, les unions assez libres. Tout se fait sur la base du volontariat, tant que l'on respecte les règles des castes. Il y a pourtant des parias, qui vivent loin au nord. Des exclus des castes, mais aussi des femmes qui ont raté leur transition.
Twern faint l'amnésie, pour s'intégrer à ce milieu, et en attendant, on lui attribut une caste à lui tout seul, celle des Visiteurs, contraints à l'errance. Mais sa venue sur ce monde va bouleverser l'ordre établi et le contacteur lui-même devra rapidement abandonner son rôle de simple observateur, pour prendre une part active aux événements.
Ti-Harnog est un roman de Christian Léourier qui fait indubitablement penser à Il est difficile d'être un dieu, des frères Strougatski, tant le postulat de base est le même: une planète à la civilisation avancée envoi des observateurs sur les planètes primitives. À charge pour ses observateurs de rester discrets et de ne surtout pas s'immiscer dans les affaires locales, et ce, quoi qu'il puisse leur arriver. Et dans les deux cas, des drames vont les contraindre à quitter ce rôle. Mais là où les Strougatski proposaient une métaphore de la Terre et de son histoire, Christian Léourier, lui, invente un monde tout entier, basé sur un système socio-politique inédit. Et c'est brillant. Ajoutons à cela un style riche, qui accompagne aussi bien les moments de répit que les batailles, et l'on comprendra que Ti-Harnog est un excellent roman qui se lit toujours avec grand plaisir.
J'ai relu ce roman dans sa vieille édition de chez J'ai lu, que je possède depuis fort longtemps, mais les éditions Ad Astra, hélas en cours de fermeture, ont eu l'excellente idée de rééditer ce roman au sein d'omnibus consacrés au cycle de Lanmeur, omnibus eux-mêmes repris en poche par Folio-SF: précipitez-vous sur ces rééditions.
21:36 Publié dans Livre, Planète-SF | Lien permanent | Commentaires (0)
15/07/2018
Kim Stanley Robinson - La Mémoire de la lumière
Kim Stanley Robinson reste un auteur dont je n'ai pas lu grand chose, mais que j'ai en général apprécié. En fouillant dans ma bibliothèque ancienne, je me suis retrouvé face à cette Mémoire de la lumière, en me demandant bien si je l'avais déjà lu ou non. Qu'à cela ne tienne: autant le (re)lire.
C'était une lecture du soir, et malheureusement je peux avouer qu'en général, je n'ai guère eu de difficultés à m'endormir.
Imaginons un futur très lointain, vers 3400. Quelques siècles auparavant, les travaux d'un physicien génial, Holywelkin, ont permis de dompter la lumière du soleil, et d'en envoyer l'énergie un peu partout dans le système, une énergie grâce à laquelle on a pu coloniser jusqu'au moindre astéroïde, en le dotant d'une gravité artificielle et d'une atmosphère.
Ce physicien fabuleux était aussi musicien, et sur la fin de sa vie, il a construit un appareil, l'Orchestre, qui, contrôlé par un seul homme, met en action des centaines d'instruments de tous types. Depuis, neuf maîtres se sont succédés aux commandes de l'Orchestre, lui-même basé sur Pluton. Johannes Wright est le neuvième. Comme ses prédécesseurs, il doit accomplir d'une longue tournée à travers le système solaire. Mais à la différence des mêmes prédécesseurs, il est le premier a essayer de coupler la physique et la musique d'Holywelkin.
Il est clair que dans ce roman, Robinson a pu placer une foule d'idées toutes plus intéressantes les unes que les autres. Mais pour faire tenir tout cela dans un même texte, il a fait le choix d'une structure narrative presque totalement linéaire, ce qui n'est pas forcément un défaut en soi, mais qui ici, fait cependant ressembler ce roman à un mauvais scénario de jeu de rôles. Quand en jeu de rôles, on peut avoir une succession de "une porte - un monstre - un trésor", ici c'est "un voyage - une planète - un concert". Ce problème n'est d'ailleurs pas compensé par les personnages, parmi lesquels seul Wright jouit d'un minimum d'épaisseur, les autres étant des faire-valoir.
Autrement dit, je me suis profondément ennuyé à la lecture de ce texte épais.
15:23 Publié dans Livre, Planète-SF | Lien permanent | Commentaires (0)
10/07/2018
Joan D. Vinge - Les Yeux d'ambre
Joan D. Vinge, après quelques romans intéressants, s'est beaucoup perdue en produisant de multiples novelisations de films. Mais avant cela, elle aussi publié une poignée de nouvelles, dont une a reçu le Hugo en 1978, nouvelles dont une partie a été réunie dans le recueil Les Yeux d'Ambre.
Commençons justement par la nouvelle éponyme, celle qui a reçu le Hugo. Les Humains ont envoyé une sonde su Titan, et y ont découvert une civilisation primitive, mais bien structurée, dont le mode de communication est la musique. Le concept pouvait paraître original à l'époque, mais plus trop maintenant. Qui plus est, passé leur apparence insectiforme et leur mode de communication, ces ET ont un esprit par trop humains, qui fait d'eux des sortes de personnages de fantasy. C'est bien raconté, mais ça ne m'a pas transcendé.
Depuis des hauteurs impensables est une courte nouvelle particulièrement touchante. Quel serait le meilleur candidat pour une mission solitaire, dans l'espace, devant durer plus années? Une mission dans un vaisseau minuscule, avec des contacts radios qui se font de plus en plus rare? Tout simplement une jeune femme qui, malade et immunodéficiente, a toujours vécu isolé du monde.
Mediaman nous transporte dans un autre système solaire, colonisé par les Humains, qui vivent dans un nuage d'astéroïdes, les planètes elles-mêmes étant réputées inhabitables. Mais cette société, qui peine à se relever d'une guerre, est sur le déclin. On n'y vit plus que de récupération dans les vestiges laissés par la guerre, et on n'y pense plus que par le biais des mediamens, des journalistes d'un nouveau genre. Psychologiquement bien troussé, basée sur un récit bien construit et un cadre original, voilà une nouvelle remarquable.
L'Aide du colporteur, par contre, déçoit. Dans un village de type médiéval, arrive un colporteur qui vent des merveilles, de la magie. Un groupe de jeunes hommes décide de l'escorter en forêt – avec pour objectif avoué de le détrousser dès que possible. Mais l'homme a de réels pouvoirs et échappe à tout, même aux maîtres de la grande ville, qu'on dit aussi magiciens. Cette nouvelle, de par son thème et son traitement, aurait pu paraître dans les années 50. Ici, elle arrive presque 30 ans trop tard.
Mais le recueil se finit en beauté avec Soldat de plomb, une nouvelle évidemment inspirée par le conte d'Andersen, mais qui le réactualise en le plaçant dans l'espace, sur un monde lointain, alors que depuis des siècles l'humanité s'est répandue. Cependant, les vols spatiaux restent compliqués: seuls des femmes peuvent piloter les vaisseaux. Des femmes qui, effets de la relativité obligent, semblent ne pas vieillir, en comparaison des habitants des planètes. Mais l'une d'elles, Brandy, rencontre un barman, Soldat, qui est un cyborg, et qui de se fait ne vieillit que très lentement. Tous les vingt cinq ans, elle fera escale sur son monde, pour quelques jours, avec l'espoir de le retrouver inchangé. C'est romantique à souhait, mais ça fait beaucoup de bien.
20:10 Publié dans Livre, Planète-SF | Lien permanent | Commentaires (0)