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08/05/2012

Jean Millemann - Sanshôdô. La Voie des trois vérités

Sanshodo.jpgVoilà qu'un jour les ET arrivent. De gros vaisseaux qui planent dans les airs au-dessus des villes. Voilà un début on ne peut plus classique. Sauf que cette fois, ils ne sont pas là pour envahir, mais pour partager. Venus en paix, ils s'inquiètent toutefois du fait que l'Humanité ne soit pas assez mûre pour ce contact, et donc limitent volontairement, dans un premier temps, les échanges. Mieux, ils créent une station qui devra servire en quelque sorte de plateforme diplomatique. La Terre y envoie en guise de représentant un docteur en biologie, charger de collecter en douce toutes les informations qu'il pourra recueillir, tandis que les ET lui donnent comme associée une Nagaï, une créature dont le physique et le mental sont ce qui se rapproche le plus des canons humains.
Très vite le Terrien subit un premier choc: les ET sont prêts à donner ce que lui vient dérober. Destabilisé, il tente de passer outre ses a priori et de mieux connaître sa partenaire.

Voilà grosso modo l'intrigue de la première - et la plus longue - des trois nouvelles qui composent Sanshôdo, un petit recueil de Jean Millemann publié chez Ad Astra, des textes tous situés dans le même univers, avec pour arrière plan cette visite pacifique des ET. D'emblée on peut constater que s'il part d'une idée particulièrement banale, Jean Millemann, à la manière de Yoss et de sa Planète à louer! sortie quasiment en même temps, la renouvelle de façon singulière. Pas de guerre sans fin, pas de combat ni de mise directe en esclavage. Mieux: des dons, gratuits. Des bienfaits venus du ciel. Et ce qui ne gâche rien, Jean Millemann est doté d'une plume sensible, qui laisse passer les émotions de façon forte. Pourtant... pourtant ça n'a pas vraiment pris sur moi. J'ai clairement eu le sentiment que les choses allaient trop vite: le personnage principal, qui n'est pas nommé, s'abandonne dès le départ, s'effondre presque, sans que rien ne le laisse sentir. On pourrait arguer qu'il s'agit d'un choc émotionnel, que cela était prévisible vu le passé de l'homme, mais on ne le sens pas assez venir, de même que toute la suite. L'auteur, à mon avis, aurait du prendre son temps, développer plus le contexte pour donner plus de force à l'évolution du mental de son héros. De fait, on ne voit quasiment pas la station, par exemple. Très vite, trop vite, tout n'est plus axé que sur le héros et sa compagne nagaï.

Il reste que Sanshôdô est un malgré tout un bon livre, qui mérite le détour et qui donne envie d'aller découvrir le reste de l'oeuvre de Jean Millemann. Mais peut-être en attendais-je un peu trop.

31/03/2012

Jérémie Parnov - L'Abécédaire de l'Apocalypse

A bon? Je parle aussi de trucs russes sur ce blog, et pas seulement sur Russkaya Fantastika? Ma foi, oui, il le faut bien car cet Abécédaire de l'Apocalypse (2010, Temps et Périodes) de Parnov, rebaptisé ici Jérémie quand il s'appelle Eremeï, ne comporte à ma connaissance pas d'élément fantastique. Parnov.jpg

A ma connaissance, car je me suis arrêté à la page 160, sur 512.

L'Abécédaire de l'Apocalypse se veut en effet un thriller basé sur le terrorisme international: qui est à la source des attentats attribués à Al Quaïda et commis en Europe? Qu'a donc à y voir une mystérieuse organisation basée au Bahamas? Ne serait-ce pas la création d'un pendant chrétien à la pieuvre islamiste? C'est ce que cherche à savoir Vicente Monteleone, un James Bond du Vatican.

Oui, un James Bond du Vatican, qui aime les intrigues, mais aussi les vêtements de luxe anglais, les vins chers et les voyages haut de gamme. Sauf que lui ne drague pas la gente féminine, bien sûr. Notons que cela aurait pu mettre du piment dans ce roman lourd, mais lourd! Parnov, dont c'est le dernier roman, nous ressort toute sa culture politique internationale, riche mais basique. Pour deux pages romanesques, nous avons le droit à dix pages de brèves de l'agence RIA-Novosti réécrites dans un style digne de Wikipedia. Evidemment, ça se lit vite (deux jours pour 160 pages), mais quand justement au bout de ces 160 pages, l'intrigue n'a toujours pas avancé d'un poil, on ne peut que laisser tomber, et regretter presque le Parnov soviétique, dont L'Âme du monde, son seul autre roman traduit en français, et coécrit avec Mikhaïl Emtsev, était autrement plus riche et ambitieux.

Lunatique 82

Allez, une revue pour changer, avec le numéro 82 de Lunatique (éditions Eons, 2011), une revue à laquelle j'ai eu l'heur de collaborer le temps d'un numéro. Comme d'ordinaire, le gros du sommaire est constitué de nouvelle, la plupart dues à des auteurs débutants ou encore peu connus.Lunatique82.jpg

"L'enlèvement du soleil" par Baldomero Lillo - un auteur chilien du tournant du XXe siècle - est une curiosité venue du fin fond des âges, pas sans défauts, mais intéressante et originale, sur la mégalomanie royale.

Suivent deux reliquats du Galaxies hors série spécial "41"; deux textes mal fichues et qui ne vont pas jusqu'au bout de leurs ambitions: Noé Gaillard et "L'Académie mise à nue" nous propose une Académie française portée à 41 membres avec comme enjeu une immortalité réelle; Yann Quero et "Les quarante et un sarcophages de titane" présente un univers de space opera qui aurait pu être intéressant s'il avait pris le temps de le développer un minimum et de donner de l'étoffe à ses personnages.

A la fin de ma lecture du volume, je n'ai gardé strictement aucun souvenir de "Chloé", d'Alain Fillion: ça doit être un signe. En revanche, "K" de Mathieu Baumier est excellente: une ambiance dystopique parfaitement crédible, un arrière plan symbolique (chrétien) subtil, une maîtrise de la langue vraiment bonne. Bref, on sent que l'auteur a déjà de la bouteille. Il faudra que je vois les romans et recueils qu'il a pu publier par ailleurs. En tout cas, on en redemande.

Autre bon texte, "Nouveau départ", d'Yves-Daniel Crouzet, un auteur que j'aime bien pour ses nouvelles doucement satiriques. Mais il a souvent le défaut de les laisser en plan sur quelque chose d'inachevé, comme ici par exemple, et c'est bien dommage car l'idée est excellente.

"Terraformer la Terre" de Jean-Pierre Laigle est lourd, long, bâti sur une idée intéressante mais malmenée par une narration qui laisse en plan plein de choses.

Fallait-il ressortir de l'oublie "Les Démiurges" de Nathalie Henneberg, un texte qui fut publié dans la précédente version de Lunatique? J'ai beaucoup d'admiration pour l'oeuvre d'Henneberg, mais il faut bien avouer que ce texte-là, datant de 1964, ne va pas loin: tout y va trop vite et on peine à comprendre l'intérêt de la chose.

Le dossier sur Alain Paris est intéressant, même si l'on sent bien que l'interview est en fait un questionnaire: les réponses d'Alain Paris sont souvent allusives et les interviewer ne rebondissent pas sur celles-ci pour creuser les sujets abordés. Dommage. Les deux nouvelles qui l'accompagne nous font passer du très bon ("Le Lâche", encore une réédition d'ailleurs puisque ce texte date de 1968), au très mauvais ("L'Aigle de sang", qui est tout juste un synopsis même pas développé).

Même s'il est donc très inégal, il serait toutefois malhonnête de dire que ce Lunatique est mauvais: Baumier et Crouzet sont vraiment des auteurs à suivre, et Lillo mériterait visiblement qu'on se penche sur son cas. Trois textes seulement, mais vu le prix de la revue (9€80), ça en vaut la peine.