07/04/2011
Alain Blondelon - Onde de choc
Après une lecture ardue et un travail pas nécessairement passionnant, il est souvent nécessaire de se plonger, pour le repos de l'esprit, dans un petit roman d'aventure, qui n'entraînera pas le lecteur plus loin que le temps nécessaire de la lecture, mais qui, s'il est bien fait, lui permettra de se détendre et de se faire plaisir. Ca tombe bien, des romans comme ça, Rivière Blanche en édite, et parmi eux, Onde de choc, d'Alain Blondelon.
L'intrigue débute alors que deux copains sont à la pêche, loin de chez eux. Lors qu'ils passent par le premier village venu, ils sont surpris de n'y trouver plus personne. Idem dans le village suivant, et ce jusqu'à Lyon, où ils finiront par croiser un couple de jeune femmes et des militaires qui ont tendance à tirer sur tout ce qui bouge. Il faut dire que ces charmants soldats sont un peu à cran: ils ont eux-même oeuvré à l'élaboration d'une arme infernale visant à éliminer (faire disparaître purement et simplement) tout créature dépassant un QI d'un certain stade. Et pour échapper à la chose, il faut être à proximité immédiate d'un point d'eau. Le roman suit donc l'errance des deux copains et de celles qui vont devenir leurs compagnes, à travers une France singulièrement vide, en dehors de hordes de chiens et de rats rendus agressifs.
Nous voilà donc face à un postulat post-apocalyptique peu banal finalement, puisque basé sur une invention absolument invraisemblable. Le degré de suspension volontaire de l'incrédulité est ici très élevé, et la chose n'est pas arrangé par le fait que l'auteur ne dote pas ses personnages d'une psychologie fouillée (il est gentil, elle est nerveuse, il est taciturne, elle est volubile; quant aux militaires, ce sont tous des méchants, mais bêtes à manger du foin), et que son style reste simple, sans la moindre fioriture. Mauvais roman? Non, pas nécessairement. Car ce que je viens de dire là m'a fait revenir en mémoire un roman du même style, Les Robinsons du Cosmos, de Francis Carsac, certes publié il y a plus d'un demi-siècle. Un roman qui souffre des mêmes défauts. Et pourtant, on ne peut s'empêcher de le lire, de se demander ce qu'il va encore arriver, et d'arriver jusqu'au bout sans s'en rendre compte. Objectif atteint: quelques heures de détente, pour peu d'efforts en contrepartie.
17:02 Publié dans Livre, Planète-SF | Lien permanent | Commentaires (0)
16/03/2011
Zhang Xiaoyu - L'envol
Le manga n'est généralement pas ma tasse de thé, étant donné les tombereaux de merde qui sont régulièrement traduits en français. En trouver tout une pile dans une solderie n'avait pas nécessairement de quoi attirer plus que cela mon attention jusqu'à ce que je me rende compte que les auteurs étaient tous chinois. Rien de bien transcendant dans ce tas sauf... cet Envol de Zhang Xiaoyu, paru en 2006 chez Xiao Pan.
Certes, la couverture, vaguement gothique, n'avait là encore pas de quoi m'attirer. Les trucs avec des anges, ça n'est pas trop mon genre. Par chance, elle n'a rien à voir avec le contenu. Et puis il y a cette mention, concernant l'auteur: "il est responsable de la revue L'Envol, spécialisée dans les récits de science-fiction". Le fait aussi que le volume est sensé contenir deux récits indépendants, et non le début d'un interminable fleuve en 32 tomes et 125 épisodes dont la fin paraîtra dans 76 ans. Enfin, il a le dessin, tout simplement. Un dessin d'une finesse, d'une délicatesse remarquable, qui n'est pas sans rappeler celui de Kazuo Koike ou encore celui de l'unique manga de Satoshi Kon.
Aussitôt acheté, aussitôt dévoré. Le premier récit, Qiao zhengfei, inventeur, s'inscrit dans les suites de la Révolution culturelle chinoise et prend pour héros le fils d'un ingénieur en aéronautique qui se suicida pour échapper à un procès politique, laissant donc un fils et une épouse qui sombra dans la folie. Et sur ce fils pèsera en permanence l'héritage du père. Nous sommes ici loin de la SF. Peu importe. Avec un récit simple, Zhang parvient à être bouleversant.
Timi, le deuxième récit, est une adaptation de L'Enfant du temps, une vieille nouvelle d'Isaac Asimov, reprise depuis avec Robert Silverberg sous forme de roman. Un scientifique dirigeant un puissant institut de rechercher temporelle engage une nurse. Son rôle? S'occuper d'un petit enfant préhistorique, que l'équipe va ramener d'une époque remontant à 40000 ans. Jouant sur l'absurdité de repousser un être humain sous prétexte de ses différences physiques et de son prétendu archaïsme, Zhang fait de son enfant non pas une sorte de brute simiesque, mais une créature à l'apparence surprenante d'elfe, oreilles en pointe incluses. Là encore, grâce à un dessin magnifique, Zhang parvient à montrer petit à petit la mégalomanie du scientifique et à dévoiler l'amour qui va naître entre la nurse et le petit garçon.
En un mot: magnifique!
Ca tombe bien, le même éditeur a publié deux autres albums de Zhang Xiaoyu. Du coup, je fonce, et pas dans une solderie, cette fois-ci.
21:40 Publié dans Livre, Planète-SF | Lien permanent | Commentaires (0)
08/02/2011
Dakha Brakha - Light
Ça fait des semaines que je pourris mes contacts sur Facebook avec des vidéos du groupe ukrainien Dakha Brakha. Il fallait donc bien que je fasse quelque chose ici, d'autant plus que leur quatrième album, Light, est sorti à la toute fin de l'année 2010, et qu'il est... comment dire... spécial.
Dakha Brakha est un ensemble qui à la base joue de la musique traditionnelle ukrainienne (cependant sur des airs de leur propre composition), avec un habillage résolument moderne. Quatre interprêtes composent le groupe, dont trois femmes, tous multi-intrumentistes (percussions, violoncelle et accordéons, essentiellement) et surtout exceptionnellement doués pour les polyphonies. Déjà sur leurs précédents disques, pouvait-on entendre quelques sonorités venues d'ailleurs: d'Afrique, d'Asie centrale, etc.
Light pousse à l'extrême le goût du métissage, et se retrouve donc être un disque particulièrement déstabilisant. Electro, dub, et même rap sont appelés en renfort, en sus une nouvelle fois d'influences africaines et même chinoises! On navigue de gentilles balades mélancholiques comme Specially for you, à d'étranges raps, pour l'un clairement assumé "des Carpathes" (Karpatskyi rep), pour l'autre clairement plus urbain, le jouissif Tjolky, qui justifient l'étiquette d' "Ethno-Chaos" que le groupe se donne.
Tout ça se clôt par un sublime Please don't cry, reprise impressionnante de Morning Light, du groupe de drum n' bass Concord Dawn (l'occasion d'entendre pour la première fois sans doute un violoncelle branché sur une pédale de distorsion!), et Buvayte zdorovi, un morceau qui retrouve des voies précédemment empruntées par le groupe, donc peu surprenant, mais qui contribue par son calme souverain à apaiser la tension soulevée par les morceaux précédents.
Il ne faut donc pas avoir peur de se laisser surprendre par Dakha Brakha, pour peu qu'on accepte de se laisser emporter par des musiques qu'on pensait ne pas pouvoir aimer (rap et dub par exemple). Il faut accepter de les laisser bousculer nos idées reçues. Light est un grand disque, qui confirme qu'il existe bien, à l'Est, une scène "ethno" d'une grande modernité, et dont Dakha Brakha est, avec la russe Inna Zhelannaya et les polonais du Warsaw Village Band, l'un des meilleurs représentants.
Il n'est hélas guère aisé de commander cet album en France, sauf à accepter de passer par des sites étrangers, comme celui-ci.
Sinon, il reste toujours cette solution.
15:37 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (0)