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19/05/2011

Nancy Kress - Feux croisés

Et voilà... presque deux semaines de laisser aller, et du coup, quelques livres lus et par encore chroniqués. On va donc essayer de rattraper le retard. En commençant par une mauvaise expérience: Nancy Kress, Feux croisés, 2009, Fleuve Noir (« Rendez-vous ailleurs »).

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Le postulat de base m'intéressait, même s'il est particulièrement classique (au point d'être repris par Bernard Werber, c'est dire si c'est rebattu!). 6000 personnes embarquent à bord de l'Ariel, un gigantesque vaisseau armé par une compagnie privée dans le but de fuir une Terre mourante (l'effet de serre est maintenant irréversible) et d'aller coloniser un monde à priori vierge. En dehors de quelques militaires embauchés tout exprès, et d'une poignée de scientifiques payés par une mystérieuse fondation, tous sont pleinement volontaires pour ce voyage sans retour, et pour lequel ils ont payé fort cher (un modèle économique qui est ni plus ni moins que celui de Virgin Galactic). Bref, après un voyage passé essentiellement en hibernation, tout ce petit monde arrive sur la planète promise, à l'écosystème particulièrement favorable à la colonisation. Sauf que extraterrestres y habitent déjà. Et semblent venir d'ailleurs.
Et là patatras... Après un bon début, Nancy Kress se révèle incapable de bâtir un roman moderne digne de ce nom. Les événements s'enchaînent à toute vitesse, ce qui n'est pas un défaut en soi, mais selon une logique linéaire. Et le tout est encombré de personnages si nombreux qu'au final aucun n'est doté d'une psychologie suffisamment développée qui aurait pu permettre de s'y attacher un minimum. On reste dans le superficiel. Bref, Nancy Kress a écrit un roman de SF des années 50, et encore. Cela n'est pas un mal en soi, du moins pour moi qui suit un amateur de SF ancienne, si elle n'avait essayé de maquiller ce récit vieillot à la manière du Nouveau Space Opera, autrement dit en entrelardant son récit d'oripeaux scientifiques. Je dis bien oripeaux et non justifications, car ces digressions, fort mal intégrées au texte, sont non seulement pénibles mais en plus de cela absolument pas crédibles. Entendons-nous bien: je me fiche qu'un auteur s'attarde à m'expliquer comment fonctionne une serrure chaque fois qu'un de ses héros ouvre une porte. La hard science me sort la plupart du temps par les trous de nez. Mais lorsque Nancy Kress nous montre une gentille paléontologue affirmer que les Velus (les premiers ET du roman) ne pas originaires de ce monde parce qu'on n'y trouve pas de fossiles d'eux, alors qu'elle-même n'y est présente que depuis trois mois et n'a sondé qu'un seul site, il ne faut pas se moquer du monde!
Bref, arriver à la fin de ce livre fut presque un calvaire. Et dire qu'il ne s'agit que du premier d'une trilogie!

06/05/2011

Laurent Poujois - L'Ange blond

La collection Icare, chez Mnémos, se veut ouverte à de bons romans d'aventures, pas forcément dotés d'une grande profondeur psychologique ou philosophique, mais bien fichus. Le genre qui peut m'attirer pour sortir la tête de lectures scientifiques parfois un brin barbantes (en ce moment Histoire des archevesques de Roüen, par Pommeray, publié à Rouen en 1667, mais on s'en fiche...). N'étant pas foncièrement intéressé par l'oeuvre de Michel Robert, mon regard s'est porté sur L'Ange blond, de Laurent Poujois, un auteur qui avait déjà fait ses classes en littérature jeunesse.

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Diantre. Une uchronie. Un art difficile à mes yeux d'historien. Un genre où les textes intelligents sont rares. Tout part ici du règne de Napoléon et de sa conquête de la Grande-Bretagne. Evidemment, la face du monde en a été changée et Laurent Poujois s'empresse de nous démontrer que ces changements ne sont pas seulement d'ordre socio-politique, mais aussi d'ordre scientifique et technologique. Point d'interdit (religieux ou autre) ici, en dehors d'une loi écologique avant l'heure - enfin, notre heure - rationnant les dérivés de pétrole, mais un non développement de l'informatique, au profit d'une industrie biologique qui produit des organismes semi-intelligents, les biones. Et ces biones sont dans l'environnement de l'Ange blond ce que que les puces électroniques sont chez nous: des petites choses envahissantes, super quand elles marchent bien, pénibles la plupart du temps.

Mais qui est donc l'Ange blond? Une jeune femme, française, qui a fait six ans de Légion pour fuir un secret familial, puis, à la suite d'une opération militaire qui a viré au désastre, qui s'est reconvertie dans la musique. L'Ange blond n'est que le nom de scène d'Aurore Lefèvre, une nana un brin pénible puisqu'elle sait TOUT faire: programmer des biones, cambrioler une villa, monter une opération commando, composer comme Mozart...

Et du fait de ces capacités multiples, on l'embauche manu-militari afin qu'elle intégre le groupe d'artistes chargé d'organisé les cérémonies du bicentenaire de la conquête de la Grande-Bretagne; groupe au sein duquel on soupçonne la présence de comploteurs qui pourraient bien profiter de l'occasion pour éliminer l'Impératrice.

Alors quoi, L'Ange blond serait un roman un peu trop facile, avec une intrigue qui pourrait sembler banale d'un premier abord? Absolument pas. Laurent Poujois est doté d'un solide talent de conteur. On sent le passage par la littérature jeunesse: une écriture fluide, un propos clair, une action enlevée, sans perte de rythme. Bref, L'Ange blond est une mécanique bien rodée, et on enchaîne les chapitres avec grand plaisir, surtout que l'auteur a évité le piège de l'Histoire: il ne s'attarde pas à dresser de vastes panoramas explicatifs, mais se contente de petites touches, d'allusions (parfois à des éléments bien de chez nous, comme les pauvres oreilles du prince Charles) suffisamment bien senties pour que le lecteur, absorbé par l'action, n'en soit pas frustré.

Au final, donc, un bon roman, passionnant.

29/04/2011

Zhang Xiaoyu - Sombre futur et Au Fond du Rêve

Je vous parlais il y a déjà quelques temps déjà de Zhang Xiaoyu, du plaisir que j'avais eu à lire L'Envol. Pour le coup, je me suis commandé deux autres albums de ce dessinateur chinois, Sombre futur et Au Fond du rêve, tous deux chez Xiao Pan.

Commençons donc par Sombre futur, puisque c'est le plus petit des deux... et aussi le plus mauvais.

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Dans un lointain futur, manifestement ravagé par une guerre nucléaire, un homme tente de survivre parmi divers groupes, plus ou moins barbares, nomades ou sédentaires. La découverte d'une carte menant à l'un des refuges antiatomiques conçus avant la guerre fait renaître l'espoir, mais aussi les tensions. Du banal, de l'archirevu, du gore trop évident, un scénario qui saute vite sur les péripéties sans donner la moindre profondeur à ses personnages, et par dessus tout, un dessin bâclé, mal torché à grand coup de photoshop pas toujours heureux. Bref, du sous Ken le Survivant, déjà que Ken, ma foi, c'est aussi de la crotte. Passons.

Pour le coup, j'avais un peu peur en ouvrant Au Fond du rêve, un album en grand format, tout en couleur.

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Des couleurs affreuses, d'ailleurs: là aussi j'ai peine à retrouver le dessinateur de L'Envol. Mais il faut savoir aller au-delà de cette première impression. Dans un futur proche, cette fois-ci, un auteur de fantasy (et non de science-fiction comme il est indiqué partout), est depuis longtemps plongé dans un coma profond, parfois ponctué cependant de crises de violences auto-destructrices, potentiellement mortelles. Dans le but de le sauver, un psychiatre, qui a plus des allures de bouffon en blouse blanche que d'un professeur à Harvard, va tester une machine qui lui permettra de s'insérer dans les rêves de l'auteur, et donc de tenter de le ramener à la réalité.

Et dans ces rêves, il retrouve l'homme, normalement chêtif, devenu un redoutable colosse passant son temps à combattre moultes créatures fantastiques. Le docteur opposera à ces créations de l'esprit des éléments rationnels. Mais qui l'emportera? Les CRS sur les hordes de gnomes sanguinaires? Les missiles sol-air sur les dragons? Le rationel du docteur sur la fantaisie de l'écrivain?

Raconté comme cela, le récit a l'air très basique. Il n'en est rien. Bien que très bref, il fait preuve d'une grand profondeur, et l'humour balourd qu'on trouve à chaque page n'est en fait que le masque d'un trouble évident, dont le sujet est la notion de "réel". Un album qui n'est donc pas parfait, mais cependant diablement intéressant. Et qui mérite la relecture.