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27/09/2018

Franck Ferric et Pierre Le Pivain – Retour à Silence

Ferric.jpgJe suis loin d'avoir tout lu de Franck Ferric, mais jusqu'ici, c'est pour moi un sans faute: Trois Oboles pour Charon est un bijou, et La Loi du désert était un excellent premier roman. Dans Retour à Silence (2014), l'auteur revient justement dans l'univers développé dans La Loi...: le monde est transformé en un vaste désert où ne subsistent que quelques rares villes gangrénées par la violence.
Ici, Alej est un ancien raffineur, autrement dit une sorte de pistolero chargé le plus souvent d'escorter des convois hors de sa ville, et autrement de faire le coup de main pour son patron. Pour son malheur, il est tombé amoureux de la fille de celui-ci, et lorsque le couple fuit la ville, elle est touché par une balle et tuée. Alej se retrouve seul en plein désert, dans un refuge qu'il a nommé Silence. Mais voilà que plusieurs années après, un pisteur, un de ses anciens collègues, a retrouvé sa trace. Pour faire cesser ces poursuites, Alej va devoir taper directement à la source, en tuant son ancien patron. 

Retour à Silence n'est pas une suite de La Loi du désert. C'est un roman tout à fait indépendant, qui peut se lire seul. Mais on y retrouve la crasse, la poussière, le désespoir, la lutte âpre pour garder ce peu de vie qu'on appelle encore "civilisation". On y retrouve aussi la patte de Franck Ferric, avec ce style fort, vif, et en même temps régulièrement poétique. Et pour bien faire, les illustrations de Pierre Le Pivain accompagnent très bien le texte (même si on aurait pu se demander: pourquoi Lucky Luke en couverture?).

Bref, il y a vraiment eu de très bonnes choses aux éditions du Riez, hélas disparues. Mais pour le coup, pourquoi donc ces très bons romans ne sont-ils pas réédités en poche? 

22/09/2018

Christophe Thill et Thomas Bauduret (dir.) - L'Amicale des jeteurs de sorts

malpertuis28-2013.jpgAutant le recueil d'Anne-Sylvie Salzman offrait un fantastique à la fois neuf et personnel, autant l'anthologie L'Amicale des jeteurs de sorts proposée par Christophe Thill et Thomas Bauduret chez Malpertuis (2013), se base sur un thème ancien s'il en est, celui des sorciers et magiciens. 

Ce sont vingt quatre auteurs que l'on retrouve donc au sommaire de ce copieux ouvrage de 350 pages. Copieux, et sans doute hélas trop long. Certes, je n'ai pas grand chose à redire de la qualité littéraire des textes: les deux anthologistes ont fait du beau travail, et on pourra juste tiquer sur un texte ou deux. Mais c'est le caractère très classique de bien des textes qui m'a parfois ennuyé. Il est difficile de faire du neuf avec du vieux. Ceci-dit, le recueil vaut le détour pour un certain nombre de textes remarquables. Robert Darvel nous présente ainsi non pas des jumeaux maléfiques, mais des siamois, en un texte surprenant qui n'est pas sans rappeler une nouvelle sordide d'Alexandre Tchaïanov. Julien Heybroeck est encore plus surprenant avec ses obèses réunis en une sorte de club informel et assassinés les uns après les autres, sans qu'ils sachent pourquoi, par des magiciens. Jacques Fuentealba présente un à-côté de son univers développé dans le roman Retour à Salem. Simon Sanahujas propose une remarquable nouvelle sur la réécriture du réel et ses risques, très bien construite même si ça n'était pas évident du tout. Hong Kong by night de Roman d'Huissier est une fantasy urbaine classique mais diablement efficace. La nouvelle de Franck Ferric est une belle et triste variation du Portrait de Dorian Gray. Et le tout se clôt par un space opera... fantastique de Karim Berrouka: un mélange des genres que l'on croise peu. 

Rien que pour ces textes, cette anthologie mérite d'être lue. 

Anne-Sylvie Salzman - Vivre sauvage dans les villes

Salzmann.jpgPlus ça va, plus je vieillis, plus j'aime la forme courte – que j'ai ceci-dit toujours préférée. Des courts romans, et surtout des nouvelles. Je lis beaucoup le soir, ou dans le train, et la nouvelle est le format idéal pour cela. Je reste aussi un fidèle de la nouvelle fantastique, ancienne comme moderne. Raison de plus pour mettre la main sur ce recueil d'Anne-Sylvie Salzman, Vivre sauvage dans les villes, paru en 2014 au Visage Vert.

Sept nouvelles, toutes très différentes, toutes très semblables. Différentes par les histoires qu'elles racontent, et que je ne m'attarderai pas à résumer. Très semblables par leur ton, leur style, leur beauté.

Ce ne sont pas des histoires gaies, c'est le moins qu'on puisse dire. Elles sont moites, crues, organiques, sang et organes y pulsent, non pas comme dans un texte gore, mais comme on le ressent soit même quand rien ne va, que son ventre se serre au point qu'on a l'impression de s'y retrouver enfermé soi-même, avalé par son propre système digestif. Sept personnages hantent ces textes, sept personnages qui n'ont pas leur place dans notre monde, dans notre petit quotidien gris, et qui cherchent à s'en échapper par l'autodestruction, ou plutôt par l'auto-dissolution.

C'est triste, glaçant même, mais beau. Et hautement recommandable.