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25/12/2020

Jean-Pierre Andrevon - Cela se produira bientôt

Andrevon2.jpgRéédition bienvenue de nouvelles de jeunesse, rédigées pour la plupart dans les années 1960, reparu en 1989 dans une version augmentée, Cela se produira bientôt est un recueil de Jean-Pierre Andrevon qui dormait depuis trop longtemps dans mes insondables piles à lire. Mais la lecture récente du Monde enfin m'a clairement incité à m'y intéresser.

Je ne proposerai ici aucun résumé des nouvelles: elles sont toutes très différentes les unes des autres. Certaines sont d'ailleurs déjà apocalyptiques, avec ce même type d'apocalypse lente que l'on retrouvera dans Le Monde enfin. Ce qu'il faut noter, c'est que très tôt Andrevon a fait preuve de remarquables qualités littéraires. Parmi les textes les plus intéressants, "Impossible amour" est poétique en diable, porté par un style qui oblige presque à le lire à voix haute pour en apprécier toute la musicalité. "Dans les mines de Mars" fait singulièrement penser à Total Recall, tant par son intrigue que par son contexte.

Jean-Pierre Andrevon a ajouté à la réédition de 1989 une postface très intéressante, dans laquelle il détaille l'origine de chaque texte, mais aussi fait le bref bilan de la science-fiction politique française, qu'on a un temps accusé de tous les maux. Mais lui-même rappelle que la science-fiction, genre qui utilise voire invente des concepts sociologiques, et un genre nécessairement politique. Un constat avec lequel je suis tout à fait d'accord.

Jean et Doris Le May - Les Créateurs d'Ulnar

Ulnar.jpgLe Bételgeuse, un vaisseau d'exploration scientifique, armé par la Fédération Galactique, découvre par hasard un système stellaire hors-normes: il est en effet formé de trois soleils autour desquels gravitent sept planètes, formant un ensemble stable improbable dans la nature. De toute évidence, ce système a été artificiellement façonné.

Une partie de l'équipage va donc rester à bord, tandis que le reste s'en va explorer l'une des planètes. Mais il ne faut que peu de temps pour que chacun finisse par se découvrir d'étranges pouvoirs de création. Ce monde idyllique pourrait-il n'être qu'un piège mortel?

Les Créateurs d'Ulnar, de Jean et Doris Le May (1972), prend place dans une série d'œuvres du duo dans lesquelles il n'est pas question d'une enquête d'Interco, mais plutôt de la découverte de mondes étranges, avec un roman dans lequel la poésie et la fantaisie ont autant d'importance que l'intrigue elle-même. Sans doute n'atteignent-ils pas ici le niveau des Fruits du Metaxylia ou des Landes d'Acherner. Il n'empêche que ce roman est de très belle facture, avec un plan soigneusement établi pour faire basculer petit à petit le lecteur dans l'étrange, l'insolite, et finalement l'effrayant. Les Créateurs d'Ulnar sort largement au-dessus du lot ordinaire du Fleuve Noir Anticipation.

Thomas Owen - Cérémonial nocturne

Owen.jpgLorsque j'étais étudiant, j'ai eu la chance de tomber une fois, dans un magasin Emmaüs, sur une collection de la défunte revue Fiction, couvrant les années 1960-1970, à laquelle il ne manquait que peu de numéros. Je me suis alors lancé dans un marathon de lecture qui a largement contribué à l'élaboration de ma culture littéraire. Et parmi les auteurs que j'ai le plus apprécié alors, il y avait Thomas Owen, avec des textes comme "La Truie" (n°161, 1967), qui m'ont durablement marqué.

Et bizarrement, je n'ai jamais rien lu de lui depuis. Il était temps de me rattraper, avec Cérémonial nocturne (1966), un recueil de courtes, voire très courtes nouvelles fantastiques, donc certaines sont littéralement des chef-d'œuvres du genre.

La structure des nouvelles, à l'exception de la dernière (et la plus longue), "Étranger à Tabiano", est en général toujours la même. Owen pose une ambiance, par le biais d'une situation le plus souvent banale: un automobiliste qui parcours une route de campagne sous la pluie en pleine nuit, un officier de l'armée belge en pleine démobilisation en 1940, une vieille dame qui vient voir son notaire. Des situations banales, certes, mais dans lesquelles, avec un talent fou, Owen distille déjà quelques éléments qui laissent entrevoir un potentiel malaise. Quelle est donc cette jeune femme recueillie sur une bord de route et qui se prétend manucure? Et ce chasseur qui revient d'Afrique? Ou ce magnifique garçon qui hante les jardins publics parisiens?

Enfin arrive cette chute, surprenante en générale sur le coup de la lecture, mais qui, à la réflexion, ne l'est pas. Car ces textes font bien entendu réfléchir. On lit rapidement ces textes courts, mais on s'y plonge pleinement grâce à l'immense talent de conteur, puis on perd pied momentanément lors de la chute. Alors on attend quelques instants, le temps de se ressaisir, et on attaque le texte suivant. Bijoux parmi les bijoux: "La Fille de la pluie", "Le Chasseur" et "La Passagère".