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25/07/2012

Clifford D. Simak - Voisins d'ailleurs

Simak.jpgIl faut bien l'avouer: même si Simak est considéré comme un auteur classique, notamment grâce à son célèbre Demain les chiens, il est un peu tombé dans l'oubli ces dernières années, et c'est bien dommage. Aussi l'initiative du Bélial' de publier un recueil de nouvelles (un sacré risque vu la frilosité maladive - pour être gentil - du lectorat français concernant ce format) de cet auteur est-elle à saluer. Neuf nouvelles, donc, plus ou moins longues, et dont les dates de parution originelles s'étalent sur toute la (longue) carrière de l'auteur.

Je ne me lancerai pas dans une description détaillée de chaque texte: ce serait long et fastidieux. Certains sont formidables (La Maternelle, Un Van Vogt de l'ère spatiales), d'autres plus anecdotiques (La Grotte des cerfs qui dansent), une est un vrai échec (Le Puits siffleur, texte peu clair, vaguement lovecraftien dans la forme, mais malaisé à comprendre). Mais c'est sur l'ensemble du recueil qui faut juger. Car il y a, en dépit de la diversité des sujets abordés, une vraie uniformité de ton et de style. Une pâte, une manière de faire "simakienne".

Disons-le clairement, si Simak avait été français on l'aurait assez souvent estampillé, à tort, de "pétainiste", avec sa forme d'exaltation de la ruralité qui n'est pas celle des hippies mais bien celle d'un nostalgique d'un passé fantasmé dans lequel la nature et la bonne entente entre voisins prime sur tout le reste. Mais bien évidemment, Simak n'est pas Barjavel. Pour lui, moins l'Etat intervient dans les affaires des gens, mieux il se porte. La nouvelle Le Voisin est d'ailleurs symptomatique de cette approche libérale idéalisée. Finalement, Simak est quelque part un utopiste. En tout cas assurément un humaniste, à sa manière.

Mais pour que cela fonctionne, pour que l'on accepte une pensée politique qui ne sera pas forcément celle qu'on l'on préfère, il faut un auteur remarquable. Simak ne brille pas nécessairement par son style, mais il sait camper une ambiance, portée sur la nostalgie, et surtout des personnages, qui fonctionnent merveilleusement par empathie avec le lecteur. Il est aisé de se glisser à la place du héros de chacune ces histoires. Ce héros, souvent un solitaire, m'est le plus souvent fort sympathique.

Tout ceci fait que ce recueil augure d'autres lectures (ou relectures) simakiennes.

Jean et Doris Le May - Les Fruits du Metaxylia

Metaxylia.jpgIl y a dans l'ensemble des romans produits par les Le May d'incontestables échecs (Vacances spatiales), mais aussi des romans populaires remarquables (Les Cristaux de Sigel Alpha, Les Hydnes de Loriscamp), et enfin des textes incomparablement plus ambitieux. Les Fruits du Métaxylia est de cela.

Pourtant le prologue n'est guère engageant. On découvre sur Mars une étrange sphète, le Métaxylia, qui semble contenir bien des informations, mais que personne n'arrive à déchiffrer. Un savant, un Ytruvien, y parvient toutefois et ce sont ainsi quatre récits tirés de ce Métaxylia, qui vont nous être racontés. Ce prologue, vaguement humoristique, s'avère un brin lourd. La suite est d'une autre trempe.

Nous sommes à une époque reculée. Un homme préhistorique, Jil, étranger au sein de sa horde, tant par son physique que par son intelligence, noue une relation étrange avec l'étalon d'un troupeau de chevaux, et tombe amoureux de la fille du chef d'une autre horde, une fille étrange, blonde aux yeux violets. Il quitte son groupe pour se lancer à la suite de l'autre, dans l'espoir d'enlever la fille.

Nous sommes dans une sorte de Moyen Âge. Un Moyen Âge avec un dragon, que chevauche Gilles, un chevalier venu au secours du roi de Vaur et de sa fille, une belle blonde au yeux violets, dont le chateau est assailli par trois sorciers rebelles et leurs troupes.

Nous sommes dans une sorte de XIXe siècle. Gil chevauche sans trêve, sur son mustang noir, pour secourir Roy de Vaur et sa fille, assiéger dans leur ranch par une troupe de brigands.

Nous sommes dans un lointain futur. Giles, agent d'Interco, à bord d'un engin semi-intelligent, s'en va à la rescousse d'un immense vaisseau de croisière endommagé - et même quasiment détruit - à bord duquel il va faire la connaissance d'une belle fille blonde aux yeux violets. Mais le vaisseau s'approche dangereusement d'une étoile naine, dont l'attraction risque de les capturer pour toujours.

Quatre histoires, presque quatre fois la même. Un cycle qui semble se répéter à l'infini au fil du temps et de l'évolution de la civilisation, sur un monde qui n'est pas tout à fait le nôtre. Quatre histoires servies par une poésie étonnante, peu banale au Fleuve Noir, et même tout simplement en science-fiction. On pense parfois à Cordwainer Smith en parcourant ces pages. Non pas par le sujet, mais par le ton employé. S'il n'y avait ce prologue inutile, Les Fruits du Métaxylia pourrait être considéré comme une oeuvre majeure.

Jean et Doris Le May - Les Hydnes de Loriscamp

Loriscamp.jpgJe l'avoue sans honte, la note qui va suivre est une reprise étendue de l'avis que j'avais émis il y a quelques années sur le forum d'ActuSF. Mais comme mon souvenir de ce roman est encore bon, je n'ai pas pris la peine de le relire.

Malgré un titre qui donne envie de répondre "A vos souhaits!" aux auteurs, Les Hydnes de Loriscamp fait clairement partie des meilleurs romans publiés par les Le May.
Un aventurier sans foi ni loi, mais pilote de génie, débarque sur une planète spécialisée dans la construction spatiale et se fait contacter par une mystérieuse organisation dont le but premier semble être la piraterie. De fait, on lui demande de se faire embaucher comme instructeur de façon à, le moment venu, détourner lors de vols d'essai un nouveau vaisseau, gigantesque et haut de gamme. Un vaisseau qui pourrait aisément être transformé en engin de guerre.
Mais qu'en est-il exactement? Quelle est cette organisation, quels sont ses buts? S'agit vraiment de simple piraterie, ou bien y a-t-il un but politique caché derrière ses actions spectaculaire. Et qui est vraiment Jocklund Kerlevin, ce pilote surdoué et téméraire?
Les Hydnes de Loriscamp est un roman trans-fictionnel à sa manière, à savoir qu'il mélange allègrement aventure, espionnage, space opera et même un peu western dans ses codes ouvertement populaires, pour en faire une sauce qui finalement prend bien. Certes, les personnages sont peu développés voire caricaturaux, mais nous sommes au Fleuve Noir, et il est difficile de s'attendre à mieux à ce sujet. En revanche l'intrigue est du même calibre que Les Cristaux de Sigel Alpha: bien ficelée, sans failles narratives et pas idiote pour trois sous. Ce roman induit chez le lecteur un plaisir immédiat et, la lecture terminée, on le repose en poussant un gros ouf - non pas de soulagement, mais comme après un bon et agréable repas, suite à ces aventures trépidantes et hautes en couleur.