Alien Nation - la série
07/12/2019
Je parlais il y a peu du film Alien Nation, plus connu en France sous le titre de Futur Immédiat, Los Angeles 1991, excellent film de science-fiction.
Une série en a été tirée, dans la foulée. Pilotée par Kenneth Johnson, elle n'a duré que le temps d'une saison et d'une poignée de téléfilms.
La série reprend le postulat et les personnages du film: nous sommes au début des années 1990, soit deux ou trois ans dans le futur. Un gigantesque vaisseau extraterrestre s'est écrasé dans le désert de Mojave, avec à son bord 250000 "arrivants", qui sont pour l'immense majorité des esclaves, et pour certains d'entre eux des gardiens. Tous viennent de la planète Tencton, dont la culture est profondément inégalitaire et basée sur des castes.
Tout ce petit monde s'est retrouvé, après une période de quarantaine, intégré bon an mal an à la population de la ville de Los Angeles.
Alien Nation nous fait découvrir, au gré de sa poignée d'épisodes, la culture des Tenctonais, qui sont humanoïdes, et ont un intellect assez semblable au nôtre. À ce titre, les scénaristes ont fourni un gros travail pour penser ces êtres dans leur ensemble: leur physiologie, bien sûr, mais aussi leurs mœurs, leurs coutumes, leurs religions, et même leur langue: une langue à clics, comme le khoisan, ce qui a dû donner bien des cauchemars aux acteurs.
Mais Alien Nation, c'est aussi une réflexion sur les USA et leur société. Une société mixte, qui, si elle est démocratique, reste aussi inégalitaire, les nouveaux venus étant souvent les mal venus. D'emblée, la série nous montre des Noirs, anciens esclaves, réagir comme des dominants face aux arrivants, clamant des slogans du même type que les "On est chez nous" des pseudo-Français de souche. Chaque épisode s'empare ainsi d'un thème différent permettant de scruter la société américaine: racisme, argent, sexe, tout y passe.
Enfin, Alien Nation, c'est une belle histoire d'amitié, entre le détective Sykes, la quarantaine, divorcé, une grande fille étudiante, homme potache et bordélique, éternel adolescent, et le détective Francisco, arrivant, qui voudrait bien devenir un Américain modèle, bon père de famille, et en même temps désireux de conserver ses traditions. Tous deux peuvent s'engueuler, voire se battre, mais ils deviennent vite inséparables, surmontant leurs différences, apprenant chacun à faire des concessions.
Chaque épisode est aussi centré sur une affaire policière, une énigme. Et il faut bien avouer que si elles sont classiques, elles n'en restent pas moins très bien troussées.
Bref, cette série a toutes les qualités: un arrière plan fouillé, des personnages attachants, des histoires prenantes, une réalisation soignée, qui a d'autant moins vieillie qu'elle fait peu recours aux trucages. Les acteurs sont remarquables, tant leur jeu est naturel, y compris lorsqu'ils doivent jouer des scènes hors normes, telle par exemple celle de l'accouchement de Susan Francisco.
J'oserai du coup dire que c'est sans doute une des meilleurs séries de science-fiction que j'aie pu voir ces dernières années.
Et pourtant... elle est introuvable en français. Il existe un coffret comprenant l'intégralité des épisodes, mais les seuls sous-titres qu'on y trouve sont en anglais. De plus, la véritable intégrale, incluant les téléfilms qui ont été tournés par la suite pour clore la série interrompue trop tôt, n'est plus disponible dans le commerce. Pour avoir accès, il faut avoir recours... au piratage! Heureusement pour les anglophones médiocres comme moi, les aimables pirates ont pensé à leur conserver leurs sous-titres anglais.
Bref, une série majeure... et quasi-oubliée faute d'une distribution correcte. Un gâchis.
Les commentaires sont fermés.