Thomas Owen - Cérémonial nocturne
25/12/2020
Lorsque j'étais étudiant, j'ai eu la chance de tomber une fois, dans un magasin Emmaüs, sur une collection de la défunte revue Fiction, couvrant les années 1960-1970, à laquelle il ne manquait que peu de numéros. Je me suis alors lancé dans un marathon de lecture qui a largement contribué à l'élaboration de ma culture littéraire. Et parmi les auteurs que j'ai le plus apprécié alors, il y avait Thomas Owen, avec des textes comme "La Truie" (n°161, 1967), qui m'ont durablement marqué.
Et bizarrement, je n'ai jamais rien lu de lui depuis. Il était temps de me rattraper, avec Cérémonial nocturne (1966), un recueil de courtes, voire très courtes nouvelles fantastiques, donc certaines sont littéralement des chef-d'œuvres du genre.
La structure des nouvelles, à l'exception de la dernière (et la plus longue), "Étranger à Tabiano", est en général toujours la même. Owen pose une ambiance, par le biais d'une situation le plus souvent banale: un automobiliste qui parcours une route de campagne sous la pluie en pleine nuit, un officier de l'armée belge en pleine démobilisation en 1940, une vieille dame qui vient voir son notaire. Des situations banales, certes, mais dans lesquelles, avec un talent fou, Owen distille déjà quelques éléments qui laissent entrevoir un potentiel malaise. Quelle est donc cette jeune femme recueillie sur une bord de route et qui se prétend manucure? Et ce chasseur qui revient d'Afrique? Ou ce magnifique garçon qui hante les jardins publics parisiens?
Enfin arrive cette chute, surprenante en générale sur le coup de la lecture, mais qui, à la réflexion, ne l'est pas. Car ces textes font bien entendu réfléchir. On lit rapidement ces textes courts, mais on s'y plonge pleinement grâce à l'immense talent de conteur, puis on perd pied momentanément lors de la chute. Alors on attend quelques instants, le temps de se ressaisir, et on attaque le texte suivant. Bijoux parmi les bijoux: "La Fille de la pluie", "Le Chasseur" et "La Passagère".
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