Serge Lehman - Aucune étoile aussi lointaine
01/12/2018
Il y a des livres comme ça, qu’on a envie de cacher. Trop souvent des livres de SF, comme Aucune étoile aussi lointaine, deSerge Lehman. La raison ? Une illustration de couverture hideuse, ici fort heureusement anonyme. C’est un éternel débat, dans le petit monde de la SF, mais finalement, on apprend assez rapidement à ne plus du tout faire attention à la couverture, à fermer pudiquement les yeux.
Et c’est tant mieux, car il serait malheureux de passer à côté d’un roman comme celui-là.
Un très lointain futur. L’humanité s’est répandue dans la galaxie, et s’est intégrée au vaste système politique qui s’y est implantée : l’Omnium. Durant des millénaires, les liaisons entre les mondes et les espèces (Serge Lehman emploie le beau terme de «nation» plutôt que «race») ont été maintenues grâces à des vaisseaux. Mais voilà que l’on commence à installer sur chaque monde des toboggans, des portails qui permettent de se rendre d’un endroit à l’autre sans le moindre effort. C’est la fin des nautes et de toute la culture qu’ils représentent.
Cela ne fait pas l’affaire d’Arkadih, un adolescent, héritier de la dynastie dominante d’un monde marginal, élevé depuis l’enfance pour devenir un naute. Du jour où le toboggan est installé sur sa planète, il comprend qu’il n’a plus sa place dans cette civilisation. Mais voilà que, guidé par une mystérieuse voix, il redécouvre le vaisseau du fondateur de sa dynastie, un engin énorme, et intelligent, qui va lui promettre une aventure qui inscrira son nom dans la légende des nautes.
Raconté comme cela, Aucune étoile aussi lointainepourrait passer pour un roman de littérature jeunesse, un énième récit initiatique d’adolescent. Or il n’en est rien. Certes, initiation il y a, mais Serge Lehman va lui faire prendre un tour inattendu : le fabuleux vaisseau d’Arkadih va devoir en effet naviguer en vitesse subluminique. Arkadih va rester jeune, tandis que tous ceux qu’il a connu vont vieillir, puis mourir, au fur et à mesure que lui-même va explorer des mondes.
La narration, qui peut sembler linéaire, est entrecoupée de fragments d’un récit cosmogonique dont on ne comprend les enjeux qu’à la fin. Et cette fin est vertigineuse. Serge Lehman a défendu bec et ongles que la SF est un genre particulièrement propice à la métaphysique : il le prouve avec ce roman somptueux, servi par une belle langue. Il y a dans son univers quelque chose du Hyperionde Dan Simmons et du Cycle de l’Élévationde David Brin, mais en plus ramassé, sans digressions inutiles. Aucune étoile aussi lointaineest un beau roman. C’est hélas le dernier de l’auteur.
2 commentaires
Je peux malheureusement témoigner de l'impact de cette couverture vu qu'elle m'a toujours retenu d'emprunter le livre quand je le croisais à la bibliothèque. Je note donc de passer outre si je retombe dessus. ^^
Il faut: c'est un excellent roman.
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