Jean et Doris Le May - Les Landes d'Achernar
09/02/2012
C'est à partir de 1971 que l'on peut réellement dire que Jean et Doris Le May deviennent des auteurs avec lesquels il faut compter. Et notamment avec Les Landes d'Achernar, signalé à l'époque par une longue critique de Jean-Pierre Andrevon dans Fiction (n°216), une longueur inusuelle pour un simple Fleuve Noir.
Cinq adolescents, bientôt des adultes, vivent isolés sur un monde dangereux, recouvert d'une jungle aux arbres millénaires et peuplé d'espèces toutes potentiellement mortelles. Quatre garçons et une fille, installés dans ce qui semble être les vestiges d'un vaisseau spatial, vestiges dispersés dans la forêt et dont ils ont fait des « Temples ». Ils ignorent tout de leurs origines, et ensemble, ils travaillent à la construction de l'Œuvre, un engin dont les plans leurs sont dictés par les Puissances, des entités qui ne peuvent communiquer qu'avec Zetha, la fille. Mais Delten, un garçon que rien ne semble favoriser dans ce monde cruel, se pose des questions : quel est le sens de cette Œuvre ? Que sont les Puissances ? Pourquoi finalement nombre d'entre eux ont été tués lors d'épreuves imposées par ces Puissances ?
Évidemment on peut considérer le personnage de Delten comme un personnage facile : celui de l'adolescent-type qui se rebelle contre l'ordre établi. Le cadre de l'intrigue aussi était déjà bien balisé : les paysages de jungle sont des poncifs des romans populaires. L'histoire – la survie d'un groupe de naufragés – n'est pas moins banale. Mais il y a clairement un plus, dans ces Landes d'Achernar. Contrairement à la plupart des romans des Le May précédemment publiés, son intrigue est remarquablement ficelé, sans faille : les auteurs nous en donnent la clé à peu près au milieu du roman, sans pour autant que cela entraîne une perte d'intérêt pour le lecteur, bien au contraire. Cette clé est si surprenante qu'en soit elle fait se poser bien des questions supplémentaires, voire même entraîne un certain vertige. Tout cela étant servi par un style maintenant bien rodé, à la fois efficace et poétique, d'une grande clarté. Le lecteur est littéralement plongé dans le paysage que les Le May veulent nous décrire. On vit aux côtés de Delten, et même si l'on en sait plus que lui sur ce qui se passe, on ne peut s'empêcher de trembler sur son sort.
Clairement, Les Landes d'Achernar mérite le titre de classique de la science-fiction française. Une réédition serait la bienvenue, que les lecteurs actuels puissent redécouvrir ce petit chef-d'oeuvre.
Les commentaires sont fermés.